On entend beaucoup parler de la compression parallèle comme étant une technique de référence pour le mixage et le mastering.
Le terme semble avoir été inventé par Bob Katz, un ingénieur du son américain célèbre spécialisé dans le mastering et connu notamment pour son excellent livre Mastering Audio: The Art and the Science.
En elle-même, la méthode de mix existe au moins depuis la fin des années 70. Elle fut initialement employée par de nombreux studios new-yorkais, ce qui lui donna son autre nom de New York Compression.
Mais concrètement, de quoi s’agit-il ? Dans quelle situation peut-on utiliser cette technique de compression audio, et pour quel effet ? Et surtout, quels sont les réglages idéaux pour la compression parallèle ?
Les réponses, dans cet article ! 🙂
Le principe de la compression parallèle
La compression parallèle est une technique assez simple mais très efficace, applicable à de nombreuses situations — aussi bien dans un contexte de mixage que de mastering.
Une technique simple
Elle consiste à prendre une piste (ou un buss) et à en dupliquer le signal pour obtenir deux pistes identiques.
Sur la deuxième, on applique une compression affectant la totalité du signal, et non pas juste les crêtes. Cette seconde piste est alors mélangée plus ou moins subtilement à la première.
Voici un schéma résumant ce concept :
A noter que dans cette idée, un certain nombre de compresseurs audio (plugins) possèdent un réglage nommé Mix ou encore Blend, qui permet justement de mélanger le signal d’origine au signal compressé.
C’est-à-dire que ces plugins peuvent nativement générer une compression parallèle, sans qu’il soit nécessaire de dupliquer la piste.
A noter : j’ai parlé dans les lignes qui précèdent de « dupliquer » les pistes pour simplifier l’explication. Toutefois, il est également possible dans la plupart des DAWs d’envoyer le signal brut d’une piste à l’autre sans avoir à en copier le contenu.
Quel est l’objectif ?
Avec la compression parallèle, la piste d’origine reste intacte. On ne touche pas aux transitoires — leur attaque est donc conservée.
Par contre, grâce à la piste compressée, on va pouvoir faire ressortir les sons les moins forts, ce qui aura pour effet de faire gagner en corps et en puissance, mais en limitant la perte de dynamique. Comme si on ne gardait que les avantages de la compression.
Et c’est là toute la différence avec la compression classique !
Si l’on avait compressé la première piste directement, les crêtes auraient également été atténuées et on aurait perdu fortement en attaque et en dynamique.
Avec la compression parallèle, à l’inverse, on entend à la fois :
- le son non compressé, dynamique et naturel, de la première piste ;
- le son compressé de la seconde, mais comme s’il n’affectait que les sons les moins forts, dont le volume est alors relevé.
Résultat : le mix sonne plus fort mais reste agréable.
Quand utiliser cette méthode ?
Comme je le disais plus haut, on peut utiliser cette technique dans de nombreuses situations de mix :
- Pour le mastering — probablement le meilleur moment pour employer la compression parallèle, qui permet alors d’apporter de la cohésion au mixage.
- Sur la batterie — la compression parallèle s’avère très efficace sur tous les buss de batterie, de percussions ou sur les beats électroniques.
- Autres usages — bien sûr, on peut très bien l’appliquer par exemple à une piste de chant, à une basse ou même à un piano pour en augmenter le sustain.
Attention toutefois à ne pas trop en abuser, au risque de dénaturer le morceau…
Les réglages
Les réglages à appliquer pour la compression parallèle sont très simples et surtout très rapides à effectuer. Que votre DAW soit Ableton Live, Cubase ou même FL Studio, ces réglages seront toujours identiques.
Tout d’abord, il faut fixer le seuil ou threshold à une valeur très basse, en fonction de votre signal d’entrée. L’idée est que tout ou presque de ce signal doit être compressé. Si vous le fixez trop haut, seules les crêtes du signal seront impactées et la compression parallèle sera moins efficace.
L’attaque doit être la plus rapide possible, pour que les transitoires soient entièrement écrasés, puisque ce sont surtout les sons les moins forts qui nous intéressent ici (et non pas les transitoires).
Le release, par contre, doit être réglé sur une valeur moyenne. Vous pouvez par exemple partir d’environ 200 millisecondes (ms), à ajuster en fonction de vos goûts et du son que vous recherchez, mais pas nécessairement par rapport au tempo.
A noter qu’un réglage de release trop rapide donnera un effet de compression trop évident, et présentant probablement de nombreux artefacts audio (effet de « pumping »).
Enfin, le ratio peut être réglé de façon plus variable, selon la texture que vous voulez donner à votre piste.
Typiquement, pour un son plus naturel, je vous conseille fortement de rester entre 1.5:1 et 2:1.
En effet, même si ces valeurs sont faibles, le signal sera dans tous les cas très compressé puisque vous utilisez un threshold très bas.
Autrement, des ratios plus élevés auront un rendu plus agressif, ce qui peut être intéressant mais est bien plus difficile à contrôler.
Enfin, une fois ces réglages effectués, il ne reste plus qu’à remixer subtilement la piste. D’une façon générale, celle-ci aura toujours un niveau inférieur au niveau de la piste d’origine. L’idée est que la piste compressée vienne soutenir la piste brute, et non pas l’inverse.
Un exemple sonore
L’effet de la compression parallèle étant très facile à entendre, j’ai pensé intégrer à cet article un rapide exemple audio pour illustrer ce qu’il est possible de faire.
J’ai pour cela utilisé un sample de beat électronique (licence CC BY 3.0 day_tripper13).
J’ai ensuite dupliqué la piste pour appliquer la compression parallèle. Pour ce faire, j’ai employé le compresseur de base intégré à mon DAW (en l’occurrence, Ableton Live), et je l’ai réglé comme indiqué plus haut.
Bien entendu, la compression est évidente et pas du tout naturelle.
Comme vous pouvez l’entendre, le rythme a gagné en volume (notamment entre les transitoires) et en cohésion. La caisse claire craque un petit peu plus, et les hi-hats (charleston) sont plus marqués.
Notez aussi que la réverbe est maintenant plus marquée, ce qui aide sans doute pour l’effet de cohésion et de structuration du mix.
On obtient donc un son plus percutant, plus fort, mais toujours suffisamment dynamique.
Pour aller plus loin
Tout d’abord, je me permets une mise en garde : la compression parallèle est très efficace mais a quelque chose d’addictif. Aussi, faites attention à ne pas l’utiliser « par défaut » sur vos mixages sans vous être posé la question « est-ce que j’en ai vraiment besoin ? ».
Par contre, je ne peux que vous inviter à expérimenter avec les compresseurs. En effet, il en existe de nombreux types, et chacun apportera un caractère sonore différent.